SoundPax : Les enceintes de Linda de Suza

Pour réaliser des haut-parleurs il y a deux écoles : les enceintes, sortes de boîtes plus ou moins fermées qui contiennent des haut-parleurs le plus souvent électrodynamiques, et les panneaux qui sont des surfaces vibrantes, en général maintenues sur la périphérie par un cadre. Cette solution peut paraître séduisante pour éviter les colorations qui seraient créées par la fameuse boîte. Les panneaux eurent d’ailleurs un certain succès dans les années 1980-1990 avec des marques comme Magnepan, Martin Logan, Apogee et bien sûr Quad. Cependant, le rayonnement en dipôle de ces haut-parleurs rend leur positionnement délicat et ils sont semble-t-il moins répandus de nos jours.

Face à ce dilemme, la prestigieuse firme DS Smith Packaging, forte de son expérience dans les emballages en carton, a imaginé une solution audacieuse qui ne s’inscrit dans aucune de ces deux voies. Pour éviter que le son de l’enceinte et l’émission du haut-parleur ne se contrarient mutuellement, ils eurent l’idée d’un diffuseur qui ne rayonne que par la boite, sans aucun haut-parleur.

Afin de ne pas désorienter l’audiophile et de permettre d’identifier la surface d’émettrice principale, le constructeur a prévu une discrète décoration.

Afin de ne pas désorienter l’audiophile et de permettre d’identifier la surface émettrice principale, le constructeur a prévu un  discret trompe-l’œil.

De nombreux détails de conception trahissent une étude rigoureuse qui ne laisse rien au hasard. Par exemple, la surface d’émission principale a une forme triangulaire étudiée pour optimiser la directivité. De même, pour éviter une émission sonore en dipôle ou en bipôle, l’enceinte SoundPax ne dispose pas de face arrière plane. La section triangulaire de l’enceinte assure que le rayonnement secondaire émis par les faces passives ne vient pas contrarier l’émission primaire de la face avant mais au contraire participe à répartir les ondes réfléchies dans l’ensemble de la pièce d’écoute afin de favoriser l’enveloppement sonore de l’auditeur. On pourrait multiplier à l’infini les détails qui prouvent une conception sans faille de cette enceinte. Contentons-nous pour finir à propos des faces latérales de l’enceinte, de mentionner l’assemblage des différents cotés par une technique originale brevetée dite de « pliage » qui permet de contrôler le spectre émis.

On distingue bien la forme triangulaire à coté de Schrodï le chat.

On distingue bien la section triangulaire de la SoundPax. Schrödi le chat quantique n’est pas indifférent à cette haute technologie.

Bien sûr cet étalage de haute technologie a un coût et l’audiophile britannique épris de haute technologie devait dépenser pas moins de 30£ en 2002 pour disposer d’une paire de SoundPax.

C'est un système large bande. Il n'y a pas de filtre, juste un condensateur pour éviter d'envoyer du courant continu sur l'excitateur.

C’est un système large bande. Il n’y a pas de filtre, juste un condensateur pour éviter d’envoyer du courant continu sur l’excitateur.

Aux mesures, les SoundPax ne sont certes pas exceptionnelles. Mais on a vu pire, et pour beaucoup plus cher (qui a dit Rehdeko ?).

La courbe de réponse s'étend de 50Hz à 20kHz... à +/- 5dB!

La courbe de réponse (en bleu) s’étend de 45Hz à 17kHz… à +/- 5dB! La directivité est très bonne comme le montre la courbe à 45° en rouge.

On passera rapidement sur les tests d’écoute. On dira simplement qu’un des grands plaisirs de l’utilisation des enceintes SoudPax est tout simplement… …de constater qu’elles sont susceptibles de produire un son. Ce qu’on a peine à croire quand on les déballe et les installe tant on est loin de tous les critères usuels de la fabrication des enceintes. Ajoutons que le rapport qualité prix est même assez incroyable, le son produit ne présentant pas de coloration rédhibitoire.

Les enceintes sont transportables dans un carton. Elles ne pésent que 2,5 kg.

Les enceintes sont transportables dans un carton. La paire emballées ne pèse que 2,5 kg.

Revenons plus longuement par contre sur la technologie utilisée. La légende veut que ce soit la Defence Evaluation and Research Agency (DERA), sorte de DARPA à la sauce à la menthe, qui en tentant de minimiser le bruit des hélicoptères découvrit l’émission sonore de panneaux soumis à une certaine forme d’excitation. Les militaires britanniques ayant plus de scrupules que les américains dans le développement des armes de destruction sonore massive telles que Justin Bieber et Miley Cyrus, la DERA préféra laisser cette technologie à des spécialistes de la hifi. Elle contacta Verity Group alors propriétaire des marques Quad, Wharfedale, Mission et Cyrus (rien à voir avec Miley). Verity créera la marque NXT pour exploiter cette technologie et revendra même les marques précitées pour financer les colossaux coûts de  développement de cette nouvelle forme de diffusion sonore dite  « Distributed Mode Loudspeaker ». Pour rester simple, disons que cela consiste à utiliser la surface du diffuseur comme un ensemble de points d’émission dont la phase est distribuée aléatoirement et non pas travaillant en phase comme sur un haut–parleur traditionnel fonctionnant en piston.

L'excitateur NXT

L’excitateur NXT

Malheureusement, pour des raisons obscures, dont certainement le lobbying des fabricants de haut-parleurs traditionnels qui n’hésitèrent pas à savonner la membrane de NXT, cette technologie ne perça pas vraiment. Après la déconfiture de NXT, différentes sociétés – Hiwaves, Flat Audio Technologies, Tectonic Elements – ont tenté de poursuivre le développement de la technologie DML.

Tant d’énergie, de travaux de recherche, d’investissement pour finalement réaliser des enceintes dans la même matière que la valise de Linda de Suza, voilà qui mérite un hommage vibrant. Cela mérite même un des plus prestigieux trophées de l’audio : un  TTaward.

Pour aller plus loin : La technologie DML expliquée, plus en détail que sur la page wikipedia. On pourra également regarder le site commercial de Tectonic Elements.

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Une réflexion sur “SoundPax : Les enceintes de Linda de Suza

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