Internet a créé un formidable changement dans le domaine de l’édition musicale. On pense bien sûr d’abord à la distribution où le streaming a remplacé la vente de disques comme principale source de revenus pour les éditeurs. On pourra trouver dommage pour les artistes de perdre le complément artistique que sont les pochettes et les livrets qui accompagnent les CD et les vinyles. En contrepartie, cela a donné l’occasion de redonner au concert sa place comme principal moyen d’échange entre les musiciens et leur public.
Internet a aussi permis de désintermédier les relations entres ces musiciens et le public. Il est devenu plus facile pour les artistes de publier leurs créations directement sur You Tube ou Bandcamp, en court-circuitant les maisons de disques. Certes l’accès n’est pas totalement direct et une publication sur internet ne trouvera son public qu’aux travers des algorithmes de recommandation dont le fonctionnement ne brille pas par la transparence. On peut même penser que certains genres musicaux n’existent que par les plates-formes : où trouver du bardcore en dehors d’internet ?
Alors tout n’est pas parfait mais Internet permet quand même d’écouter des musiques que nous n’aurions pas découvertes par le biais des médias traditionnels, radio, TV et magazines.
C’est par You Tube que nous avions découvert le groupe Pomplamoose il y a une dizaine d’années. Pomplamoose c’est un couple, le claviériste Jack Conte (1) et la chanteuse Nataly Dawn. Ils ont commencé par des reprises assez originales de succès populaires (Telephone de Lady Gaga par exemple), souvent accompagnées de vidéos tout aussi originales. On concédera que le charme de Nataly n’est pas totalement étranger aux succès de ces vidéos, notamment la légère myopie qui lui donne ce regard mystérieux …
Tout en publiant ses propres compositions, Pomplamoose continue de poster sur You Tube des vidéos de reprises, maintenant sous une forme plus classique mais toujours avec une grande qualité d’interprétation et de réalisation. On pourra trouver d’ailleurs sur la plate-forme une vidéo ou Jack explique la véritable petite industrie qu’est devenue la chaîne Pomplamoose sur You Tube.
Avant de rencontrer Jack Conte à Stanford, Nataly Dawn a passé une bonne partie de son enfance en France et en Belgique. Elle parle parfaitement le français ce qui nous amène à l’album que nous présentons.
Impossible à prononcer est un album de reprises de chansons françaises dont des airs de Trenet, Brassens, Brel ou Renaud. C’est aussi le premier album de Pomplamoose publié en vinyle.
Outre la qualité des artistes, un tel hommage du nouveau monde 2.0 à la chanson française et à la tradition audiophile méritait bien qu’on consacre un article à cet album.
Enfin, s’il faut encore un argument pour vous convaincre de vous précipiter sur cet album, on précisera qu’il contient une reprise d’un des chefs-d’oeuvre de la chanson à texte : Assedic des Escrocs.
Conseil de dégustation:
Pour un hommage à la chanson française, il nous fallait bien évidemment une platine du même métal. On choisira donc une ERA 444. A l’époque de Dual, Lenco, Thorens et autre Garrard, ERA était avec Barthe le représentant de la hi-fi à la française. La 444 est une platine assez traditionnelle, entraînement à courroie et contre-platine suspendue. Elle est conçue fort intelligemment malgré une réalisation un poil en dessous de celle des marques germano-suisse. Créée en 1962 pour profiter du développement de la haute-fidélité, la maison Études et Recherches Acoustiques aura eu le grand mérite de lancer J.C. Verdier dans la conception des tourne-disques. Verdier quittera ERA au début des années 70 après le changement de propriétaire de la société, non sans avoir laissé une belle série de platines. Mais ce qui fait l’originalité de la 444 (et de la majorité des platines ERA) c’est son bras dit à pivot fictif. En fait au lieu d’avoir un axe de rotation horizontal, le bras en lui même est suspendu entre quatre ressorts plats positionnés en X.
(1) Par ailleurs fondateur et CEO de la plate-forme de financement participatif Patreon, créée pour financer ses propres projets d’artiste.