La pomme de Newton

Dansnewton l’imaginaire collectif, les grandes découvertes, celles qui ont donné lieu à la création d’une branche nouvelle dans les sciences, sont souvent liées à un événement anecdotique. C’est le caractère proprement génial de l’inventeur qui transforme cette expérience somme toute banale en une découverte majeure.  Qui d’autre que Newton aurait découvert la gravité en faisant la sieste sous un pommier ? Qui d’autre qu’Henri Becquerel aurait osé justifier  auprès de sa femme Louise la présence de photos dénudées de la jeune top modèle polonaise Marie Sklodowska sur son smartphone par l’exposition inopportune  de celui-ci aux sels d’uranium (1)  ?

La révolution qui à la fin du XXe siècle a entraîné le monde audiophile dans une nouvelle ère est elle aussi dû à un évènement fortuit, certes moins connu que celle de la contamination d’une boite de Petri par un champignon chez Fleming. Bien que n’ayant pas (encore) permis à Jean Hiraga d’obtenir un prix Nobel (mérité), cette anecdote mérite d’être contée.

Le fameux attelage Hiraga (photo Le musée de l'audiophile)

Le fameux attelage Hiraga – photo  © Monster Cable Foundation for Arts

En ce mois d’août 1976, Jean Hiraga et Thérèse sa femme s’apprête à partir camper sur l’ile d’Oléron, comme tous les étés. Les préparatifs se déroulent dans la joie et la bonne humeur jusqu’au moment au Jean atèle la caravane Sterckeman à sa fidèle 504. Hélas mal attachée, la caravane dévale la petite pente de l’allée, arrachant au passage le faisceau électrique qui la relie à la Peugeot. Heureusement, Jean est bricoleur et entreprend une réparation de fortune tandis que Thérèse s’impatiente. Dans son atelier, il attrape des fils d’un cuivre particulièrement purs ramenés d’un récent voyage au Japon et de la soudure à l’argent. Après quelques minutes de travail c’est le miracle. Non seulement les feux fonctionnent de nouveau mais les clignotants semblent plus réguliers, les feux stop s’allument plus rapidement et les feux de position sont visibles de plus loin.

page1Il ne faudra pas longtemps à l’esprit brillant de Jean Hiraga pour imaginer que la qualité du câblage puisse aussi avoir une influence sur le son des chaînes haute-fidélité. De la naîtra c’est science nouvelle qui va rapidement apporter ses lettres de noblesse à l’audiophilie. Dès le mois d’octobre, il publie dans la Nouvelle Revue du Son, l’article séminal de la Connectologie : « Un maillon souvent négligé : les câbles de liaison. ». Cet article connaîtra une immense audience, en particulier après sa traduction en anglais dans le Hifi News and Record Review d’août 1977 « Can we hear audio connecting wires? »

Cette nouveauté ne fut pas immédiatement comprise par tout le monde et on la réduisit parfois à de basses considérations de physique classique telle qu’un circuit RLC. Des esprits brillants comme Nelson Pass feront cette confusion comme le montre cet article de Speaker Builder de 1980. De même, une lecture trop rapide est à l’origine de l’importance donnée à un soit disant effet de peau des conducteurs électriques alors qu’il fallait lire l’effet d’appeau (à pigeon) qui s’applique à la connectologie.

Comme toute discipline nouvelle, la connectologie a vu des progrès rapides lors de sa courte – 40ans – histoire.

  • À la fin des années 1970, la connectologie s’intéresse essentiellement aux relations entre les amplificateurs et les enceintes.
  • Dans les années 1980, un nouveau champ d’investigation s’ouvre : la connexion entre les sources et les amplificateurs.
  • Les années 1990 voient la théorie de la connexion universelle s’étendre au domaine des flux numériques.

A la fin du XXe siècle, le connectologie se restreint à l’étude des relations entre les boîtes, boîtes se comprenant au sens d’élément de chaîne hifi. Elle n’a rien avoir avec l’électricité et l’électronique qui sont deux sciences mineures qui peuvent parfaitement suffire à assurer la continuité électrique au sein même des enceintes et autres  sources et amplificateur. D’ailleurs, les câbles électriques qui relient divers appareils permettent à du courant et des tensions de transiter dans une chaîne hifi,  voir même à transmettre du  son, seule la connectologie permet la circulation de la Musique, cet élément immatériel qui ne se mesure  qu’avec des Aureum Auribus Audiophilis.

La connectologie n'est pas qu'une science, c'est aussi un art.

La connectologie n’est pas qu’une science, c’est aussi un art.

D’ailleurs pour bien montrer que la connectologie  ne s’intéresse pas qu’à la transmission du signal sonore, elle va se tourner au XXIe siècle vers un domaine ou ne circule aucun signal : les relations entre les boites et les murs (autrement dit les cordons secteurs).

Ce qui nous amène à la dernière grande découverte de la connectologie : le cordon USB audiophile.

Disons-le tout net : il s’agit d’une invention majeure et même d’un changement de paradigme qui nous amène à repenser complètement notre façon de comprendre la théorie du signal.

Il existe deux moyens de transmettre des données numériques entre un périphérique de stockage et un convertisseur numérique analogique (DAC) : le mode synchrone et  le mode asynchrone.

Le mode synchrone est simplement de la transmission numérique basique comme entre un lecteur optique et un DAC traditionnel.  Elle est susceptible de connaître les avanies  classiques de ce type de transmission où le signal d’horloge est lié au signal : jitter…

Cette technique est délaissée de nos jours au profit de la transmission asynchrone qui consiste en fait à transmettre tout ou partie des données, y compris les données de correction d’erreur, sous forme de fichier.  Ces données sont stockées sur l’appareil receveur afin d’être interprété selon son propre rythme. La seule contrainte est que cet espèce d’armoire de stockage (qu’on appellera donc buffet) ne soit jamais vide, ce qui avec les vitesses de transfert actuelles n’est pas un problème. Cette technique de transfert est extrêmement fiable. Dans le cas de transfert d’un fichier texte par exemple, il arrive rarement de trouver des fautes d’orthographe apparaitre quand on passe d’un appareil à un autre.  Mais la transmission de la Musique, fut-ce sous forme de fichier, obéit à d’autre lois. En effet un bit de musique numérisé n’est pas seulement 0 ou 1 mais contient un morceau de Musique, qu’on peut représenter comme un nombre complexe :
                                                               bit = b +i.μ
ou b vaut 0 ou 1 et μ représente le morceau de mu(sique) « encapsulé » dans le bit.

On comprend donc bien le rôle du câble audiophiles : prendre en compte cette composante complexe du signal qui va être délaissée par le câble USB classique. Il est donc indispensable du point de vue de la connectologie d’utiliser un câble USB audiophile pour transmettre de la Musique, y compris dans le cas de transfert asynchrone.

On comprend bien les critiques des soi-disant objectivistes à cette théorie. En particulier sur le fait que les studios n’étant pas en général équipés de câbles audiophiles, la composante µ de l’enregistrement aura disparu au moment du mastering du CD. L’exemple ci-dessous montre bien l’intérêt pour l’audiophile de s’adresser à des éditeurs phonographiques sérieux qui sauront être attentifs à l’ensemble des composants, y compris la connectique. On comprend également mieux l’intérêt des traitements des CD tel que  le fameux traitement anti-MIS  et autres feutres verts qui plus ou moins tentent de recréer le µ disparu.

Premier sample de 1438e frame de

Premier sample de 1438e frame de « Jazz at the Pawnshop »

Premier sample du 5836e frame de

Premier sample du 5836e frame de « Believe » de Justin Bieber sur lequel on remarque le faible niveau de µ

La seconde critique des objectivistes serait que l’oreille est insensible à la partie complexe de la musique numérisée. Soyons clair : ils ont raison comme l’ont montré de nombreux articles publiés dans le Journal of the Association for Research in Otolaryngology. Mais comme le fait remarquer Archiblad, c’est oublié un peu vite que l’oreille, même celle de l’audiophile, est essentiellement sensible à la pression efficace – dite RMS chez nos amis anglo-saxon – soit :

pressionoù p’ est la puissance acoustique instantanée, ici élevée au carré. Or cette puissance instantanée est évidemment liée à la conversion en intensité ou en tension du sample de musique numérique considéré. In fine la valeur qui sera prise en compte par l’oreille sera donc lié au carré de la valeur du sample soit par exemple pour un codage sur 16 bits  :
pression

Expression dont la partie réelle au sens mathématique – et donc audible – est :

pression

Que constatons-nous ? Eh oui, la musicalité intervient tout autant sur le signal entendu que le contenu en bits. Nous pensons humblement tenir là une démonstration qui réconciliera les subjectivistes et les objectivistes !

Évidemment, ce déploiement de technologies aux frontières ultimes de la connaissance a un coût comme le montre le tableau ci dessous.

Extrait du catalogue de The Cable Company

Extrait du catalogue de The Cable Company

Nous croyons  à Tryphonblog au progrès continuel de la science il est fort à parier qu’ alors que commence à apparaître des câbles ethernet audiophiles dans  les laboratoires ultra secrets de Crystal et de Kimber des chercheurs travaillent déjà sur la prochaine frontière, le boitier CPL audiophile, l’antenne wifi du même métal et pourquoi pas  la corde à linge audiophile qui assurera au porteur du T-shirt sur laquelle il aura séché  une écoute plus vivante et plus dynamique.

(1) Je tiens cette anecdote sur l’invention de la radioactivité  à mon ami Archibald. Wikipédia et les organes d’information grand public n’en donne qu’une version extrêmement expurgée.

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